Emission 90 : Gilles de Gouberville, un gentilhomme normand du XVIe siècle, et son journal, avec Marcel Roupsard

Quatre-vingt-dixième numéro de Chemins d’histoire, neuvième numéro de la troisième saison

Émission diffusée le mercredi 3 novembre 2021

L’invité : Marcel Roupsard, professeur honoraire de géographie à l’université Caen-Normandie, éditeur avec Philippe-René Bazin du Journal de Gilles de Gouberville, 3 volumes, Archives départementales de la Manche et Comité Gilles-de-Gouberville, 2020.

Le thème : Gilles de Gouberville (1521-1578) et son Journal

Le canevas de l’émission

Un document extraordinaire. Un livre de raison, un journal ? « Mises et receptes » (voir p. 41 et 361 du tome 1). Présentation en quelques mots. Lecture de la p. 41 du t. 1er, pour plonger tout de suite dans l’univers du journal (du lundi 25 mars au jeudi 28 mars 1549). Analyse : les lieux (« céans », Gouberville, Saint-Pierre, etc. ; les personnages (Gilles, Symonnet ou Simon Picot, demi-frère naturel de Gilles, Thomas Drouet, grand ami et peut-être frère naturel de Gouberville, Thomas Langloys, écuyer, sieur de Cantepye, homme de confiance de Gouberville, etc.) ; un gentilhomme, exploitant agricole (quelles activités ici ? la greffe des arbres fruitiers). Un « je » monotone et gris (Claude Quétel) qui relate le film des jours… une mine pour l’historien.

La redécouverte du texte mérite d’être rappelée. Quelle histoire matérielle du document ? En 1867, l’abbé Alexandre Tollemer découvre un puis deux volumes du livre de raison de Gilles de Gouberville (années 1553-1563). Le propriétaire en est Raoul de La Gonnivière, conseiller général et châtelain de Saint-Germain-de-Varreville. Tollemer en propose une étude thématique. Un troisième registre est découvert par Louis Drouet, érudit de Valognes, dans le chartrier du château de Saint-Pierre-Église, en 1886. Il correspond aux années 1549-1553. Les trois cahiers sont publiés dans les années 1890 (par Eugène de Robillard de Beaurepaire, 1892, années 1553-1563, puis par Auguste de Blangy, 1895, pour les années 1549-1553). Les trois cahiers manuscrits sont aujourd’hui introuvables. On est donc largement tributaire des éditions des années 1890 (réédition globale en 1993-1994 par les éditions des Champs). C’est exclusivement (ou presque) le cas pour la partie du journal concernant les années 1549-1553. Pour la partie suivante, on dispose aussi de sept photographies réalisées en 1937, des transcriptions manuscrites de Tollemer et de Léopold Delisle, de copies de notes de Paul Le Cacheux. Voir Archives départementales de la Manche, 19 J.

Quel travail effectué par Marcel Roupsard ? Erreurs avérées ou probables, le cas problématique des passages avec une écriture codée (voir l’introduction du volume 2 de 2020). La mise en ligne du Journal (pour les années 1553-1563) avec l’aide du laboratoire ATILF (Analyse et traitement informatique de la langue française, CNRS et Université de Lorraine). Voir les explications de Philippe-René Bazin dans le volume 2, p. 481 et s. (numérisation, encodage et lemmatisation, visant à regrouper les formes sous les « lemmes » correspondants). L’édition papier en trois volumes de la fin 2020. Préface par Yves-Marie Bercé et par Hugues Daussy (volume 3). Mises au point signées Stéphane Lainé (langue), Sophie Poirey (droit normand, dictionnaire des principaux personnages, cartes, glossaire, sources et bibliographie, etc. Une édition double… et des manifestations pour le 500e anniversaire de la naissance de Gilles de Gouberville.

Un objet historiographique fascinant : Claude Blanguernon, ethnographe amateur (biographie de 1969, rééditée en 1993), Emmanuel Le Roy Ladurie (qui réédite les commentaires de l’abbé Tollemer, en 1972, avec la fameuse introduction « La verdeur du bocage »), Madeleine Foisil (livre de 1981, préfacé par Pierre Chaunu, lequel parle de « la pudeur du bocage », livre aujourd’hui disponible chez Flammarion, avec une préface de Nicolas Le Roux). Autres travaux (Yves Nédélec, mais aussi Katherine Fedden, Erich Poppe, voir volume 2, p. 468-469). Le Comité Gilles-de-Gouberville et les Cahiers goubervilliens. Marcel Roupsard et Gilles de Gouberville.

Virgule

Quelques points saillants du Journal. Les paysages de Gilles de Gouberville. Le domaine du Mesnil-au-Val, en Cotentin. Le manoir et le domaine. Quel paysage ? Quelles évolutions paysagères ? Le bocage et la périurbanisation. Le bestiaire du bocage : lièvres, renards, sangliers, cerfs, loups (voir p. 391 du t. 2, 29 mai 1558, dimanche de Pentecôte, « Après disner, une louve vinst à La Coulombière et emporta ung agneau »). Les autres lieux du Journal : le Cotentin et au-delà (Russy et le Bessin, le voyage exceptionnel à Blois en 1556, Gilles de Gouberville, lieutenant des eaux et forêts, reçoit cette charge en survivance de son père en 1543, office qu’il essaie de transformer vainement en celui de maître des eaux et forêts, en 1556 précisément).

L’univers des hommes. Un trait d’union entre deux mondes ? Le manoir. Le groupe d’existence de Gilles de Gouberville dans le Cotentin. Un monde masculin, la place des humbles et du monde du labeur (les travaux et les jours, le travail de la terre, agriculture et élevage, Gilles de Gouberville, éleveur de bovins, la place de l’arboriculture). Au-delà du Mesnil-au-Val, Gilles de Gouberville comme trait d’union entre campagnes et villes (Valognes, Cherbourg et les autres). Quelle sociabilité ? Le jeu de la choule.

Le temps et ses rythmes. Les observations météorologiques de Gilles de Gouberville. L’accélération du temps : la Réforme et les guerres civiles.

Fac-similé d’une page du Journal de Gilles de Gouberville
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