Emission 85 : Une histoire de la radio nocturne en France depuis 1945, avec Marine Beccarelli

Quatre-vingt-cinquième numéro de Chemins d’histoire, quatrième numéro de la troisième saison

Émission diffusée le dimanche 19 septembre 2021

L’invitée : Marine Beccarelli, docteure en histoire contemporaine de l’université Paris I-Panthéon-Sorbonne, autrice de Micros de nuit. Histoire de la radio nocturne en France, 1945-2012, PUR, 2021.

Le thème : Une histoire de la radio nocturne en France depuis 1945

Le canevas de l’émission

Le projet. Une thèse (dirigée par Myriam Tsikounas) devenue un livre. Un objet complexe qui associe la radio, média de l’intime et de l’imaginaire, et la nuit, un espace original qui a trouvé récemment ses historiens et ses historiennes. Radio et nuit vont bien ensemble : pourquoi ? Les béances de l’historiographie. Délimitations de l’objet. Quand commence et quand finit la radio nocturne ? Quelle période et quel espace d’étude ? Les sources de l’enquête. Les archives sonores des émissions, diversement conservées (primat aux stations publiques, mais avec des réserves, exemples), 27 entretiens avec des professionnels de la radio de nuit, essentiellement des producteurs-animateurs, 6 entretiens avec des auditrices et auditeurs. Quelle documentation écrite ? Exemple du fonds Macha Béranger, animatrice d’Allô Macha, sur France Inter, entre 1977 et 2006.

Avant 1945 : une radio nocturne qui reste de l’ordre de l’exceptionnel, avec des dimensions de mystère, de clandestinité, d’accompagnement, d’angoisse. Explications et exemples. Entre 1945 et 1955, les Français écoutent la radio le soir, en général en famille (en 1953, la radio est présente dans 9 foyers sur 10). Exemple des émissions de Stéphane Pizella, en particulier Les Nuits du bout du monde (émission qui voit le jour en 1950). Après 1955, dans un contexte qui voit le poids grandissant de la télévision mais aussi l’arrivée du transistor et une écoute plus individuelle des programmes radiophoniques. Route de nuit, sur France Inter à partir de juin 1955 (automobile, autoradio et téléphone), un programme qui s’étend à partir de 1957. En quoi consiste ce programme ? Cocteau et Route de nuit (p. 96-97, lecture 1, p. 96). Dynamiques antérieures (on retrouve les hommes de la nuit comme Luc Bérimont ou Stéphane Pizella) et nouvelles émissions culturelles (Le Masque et la Plume, à partir de 1955 ; Inter Minuit, animé par José Artur, préparé par Roland Dhordain, en 1959-60). Radio nocturne et guerre d’Algérie.

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Nouveau type de nuit radiophonique entre 1965 et 1975. Un élargissement des programmes. Les auditeurs sont de plus en plus présents dans les émissions (exemples, Route de nuit, jusqu’en 1973 ; Les Routiers sont sympas, émission créée en 1972, finalement associée à RTL). Un symbole du renouveau de la nuit radiophonique : Le Pop Club de José Arthur (créé en 1965, dont on ne possède que très peu d’archives sonores). Les horaires : 22 h-1 h puis (1969) 22 h 30-1 h 30. Les lieux : le bar noir de la maison de l’ORTF, ou bar du Ranelagh ; d’autres lieux aussi (émission aussi itinérante, en France ou à l’étranger). José Artur, quel profil ? « Un bavard qui sait écouter » (entretien avec l’autrice, 2012). Quelles équipes ? Quelques noms. Quels invités ? Une vitrine de la vie nocturne. Quelle atmosphère ? Improvisation décontraction, bavardages, impertinence. La musique (les nouveautés des disques pop, la musique en direct). Engagement et liberté, sensualité et interview-séduction, l’alcool. La liberté ? En décembre 1965, José Artur dit : « C’est très agréable, parce qu’on peut fumer, on peut boire, on peut parler, on peut dire ce qu’on pense » (citation, p. 177). Des suspensions d’antenne. Les auditeurs. Quel profil ? Les auditeurs à travers les lettres envoyées à José Artur. Un modèle Pop Club ?

La nouvelle nuit radiophonique à partir des années 1970 : la nuit de l’intime. C’est l’éclosion des programmes de dialogues nocturnes. Quelle préhistoire ? Ménie Grégoire au miro de RTL à partir de 1967 ; Madame Soleil à partir de 1970 sur Europe 1. Naissances : Ligne ouverte de Gonzague Saint-Bris, sur Europe 1, à partir de septembre 1975. Un succès. De quoi parle-t-on ? Quel profil des auditeurs ? L’émission est supprimée en 1980. Elle fait des émules. La naissance d’Allo Macha, le 5 avril 1977, une émission qui fait immédiatement impression. Lecture 2, p. 227, d’un article de Victoria Thérame publié dans Charlie-Hebdo. Autour d’Allô Macha (46 émissions ont été intégralement écoutées entre 1979 et 2006, regroupant 190 auditeurs). Voir le corpus des lettres conservées aux Archives nationales et étudiées pour la période 1986-1994 (p. 255). 

La nuit comme laboratoire d’expérimentations et de recherches radiophoniques. Les Choses de la nuit sur France Inter, un objet radiophonique à part (Jean-Charles Aschero, à partir de 1976 et pendant 20 ans, le week-end). Sur France Culture, De la nuit puis les Nuits magnétiques d’Alain Veinstein (à partir de janvier 1978). De quoi s’agit-il ? Quelle est la teneur de l’émission ? A coté de la nuit intime, la nuit festive et musicale (quelques voix), la nuit des pirates et des radios libres.

Vers l’extinction des voix de nuit. Un mouvement précoce ? Le recul des émissions en direct (exemple des Nuits de France Culture, à partir de 1985). Recompositions et renouvellements. La nuit adolescente. Bonsoir la planète, sur Sky Rock (décembre 1991) et Lovin’Fun sur Fun Radio (aout 1992, Difool et Le Doc). Nouveau dialogue de nuit sur Europe 1, avec La Libre Antenne de Caroline Dublanche (à partir de 1999). L’extinction des voix est somme toute récente. La fin du Pop Club (2005) et d’Allô Macha (2006) sur France Inter. La disparition des nuits de France Inter, en plusieurs étapes. Les derniers producteurs de nuits (quelques noms, Serge Le Vaillant, Sophie Loubière, Brigitte Palchine, etc.). Aujourd’hui, les rediffusions commencent à 23 h 10 sur France Inter du lundi au samedi, à minuit le dimanche. Comment l’expliquer ? Facteurs techniques, économiques, etc. Des voix dans la nuit : Georges Lang et Les Nocturnes, sur RTL depuis 1973 ; la nuit de l’intime sur RTL, avec Caroline Dublanche (depuis 2018) et sur Europe 1 (Olivier Delacroix et Sabine Marin). La nuit à la radio, c’est fini ? Épilogue. Une contribution à l’histoire des sensibilités du second XXe siècle.

Macha Béranger dans les studios de France Inter
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