Deux-cent-huitième numéro de Chemins d’histoire, treizième de la sixième saison
Émission diffusée le lundi 27 janvier 2025
Les invités : Alban Perrin, formateur auprès du Mémorial de la Shoah, et Roger Fajnzylberg, ancien directeur de l’Œuvre de secours aux enfants, fils d’Alter Fajnzylberg, détenu à Auschwitz-Birkenau de mars 1942 à janvier 1945, forcé d’intégrer pendant dix-huit mois le Sonderkommando, auteur d’un récit, en polonais, rédigé entre l’automne 1945 et le printemps 1946, de ce qu’il a « vu dans le paradis hitlérien à Auschwitz », pour reprendre le titre de l’un de ses cahiers, le cahier rouge, publié comme les autres cahiers sous le titre Ce que j’ai vu à Auschwitz. Les cahiers d’Alter, Seuil, 2025.
Le thème : Auschwitz, Alter Fajnzylberg et ses cahiers
Le canevas de l’émission
Au cœur de ce livre et de cette édition : une boîte à chaussures. Boîte à chaussures comprenant les manuscrits du père de Roger, Alter. Manuscrits écrits à la plume et au stylo sur de simples cahiers d’écolier ; cahiers vert, rouge, jaune, violet. Boîte à chaussures transportée d’appartements en appartements, jusqu’à Sèvres, chez Roger, après la mort de la mère, en 1991. N’ose pas ouvrir cette boîte tout de suite. Déclic en 2005. Décision de la publication. Grâce à l’aide d’Alban Perrin, avec le concours de Patrycja Kowalczyk (pour la traduction). Quelle édition proposée ici ? Edition intégrale, sauf le cahier vert. Le document le plus important : le cahier rouge (récit d’abord chronologique puis témoignage d’ordre général). Le cahier jaune, qui comprend notamment l’évasion d’Alter pendant l’évacuation du camp. Le cahier violet, qui comprend diverses notes éparses. Quel projet éditorial ? Entre histoire et mémoire. Des recherches spécifiques (à partir des cahiers et bien d’autres matériaux, témoignages d’Alter entre 1945 et 1985, archives en France, en Pologne, en Allemagne, en Grèce, en Russie)… au diapason d’un effort historiographique substantiel.
Virgule, avec extrait 1 : « J’écris cette brochure car, pendant toute la durée de ma détention dans les camps allemands, où l’on m’a torturé, je me suis efforcé de survivre pour révéler aux nations et graver dans leur mémoire ce que l’humanité n’avait jamais connu dans son histoire […] Je dédie ce document sur ma détention au camp aux millions de patriotes innocents et silencieux qui sont morts dans les prisons et les camps, aux villes incendiées et détruites, à l’Europe en ruines. Nous devons nous venger de l’oppresseur. Nous devons totalement détruire l’hydre teutonique avec ses appétits impérialistes. La botte allemande doit quitter l’arène. […] Sur les 1118 personnes qui ont été déportées de Compiègne, nous sommes à peine 25 à être restés en vie. [….] J’ai survécu grâce à notre organisation clandestine. […] Que les gens qui n’ont pas eu l’honneur de connaître le paradis hitlérien d’Auschwitz apprennent encore un peu de vérité. »
Sur les traces d’Alter Fajnzylberg. Né le 23 octobre 1911, à cent kilomètres au sud-est de Varsovie (acte de naissance, p. 21, rédigé en russe). Localité : Stoczek, petite bourgade où les juifs sont majoritaires, un shetl. Parents d’Alter : couple de juifs orthodoxes, très pieux. Treize enfants, Alter est le septième. La famille déménage plus tard au sud de Varsovie, à Otwock. Itinéraire d’Alter (en apprentissage chez un menuisier, adhère aux Jeunesses communistes, en 1927, garçon de café, intense activité politique, emprisonné à plusieurs reprises). En février 1937, prend la route, avec un groupe d’une cinquantaine de militants, pour combattre en Espagne. Franchit clandestinement les Pyrénées, non sans mal, en juillet 1937 : engagement dans les Brigades internationales. Sur son activité en Espagne entre 1937 et 1939, voir ce qu’en disent les archives du Komintern à Moscou. Dans la brigade Dabrowski. Après la chute de Barcelone, c’est la Retirada. Franchissement de la frontière à Cerbère, le 11 février 1939. Dans les camps d’internement dans les Pyrénées, jusqu’en juin 1941. Part pour Lorient (s’est fait engager par l’organisation Todt) puis décide de fuir la Bretagne par crainte d’être dénoncé par un ancien brigadiste international.
Arrêté à Paris, le 22 septembre 1941, avec un camarade. Conduit au camp d’internement de Drancy. A Drancy puis à Compiègne. Fait partie du premier convoi de déportés juifs de France qui quitte la gare du Bourget le 27 mars 1942. Arrivée à Auschwitz le 30 mars, pas de processus de « sélection » à l’époque. Reçoit le matricule 27675, enregistré sous le nom de Stanislaw Jankowski. A Birkenau puis retour à Auschwitz. Au Krematorium du camp d’Auschwitz entre novembre 1942 et juillet 1943. Transfert à Birkenau, en juillet 1943. Au sein du Sonderkommando, jusqu’en janvier 1945. Tentative de fuite en août 1944. Extrait 2. Quel rôle dans la révolte du Sonderkommando, le 7 octobre 1944 ? Evacuation et évasion. Libre en mars 1945. Témoignage à Cracovie. A Budapest, à l’été 1945. Arrivé en France le 6 septembre. Témoignage, à Reims, le 20 octobre 1945.
Après la guerre. Mariage avec Régine Besserman, en 1946. Naissance de Roger, en 1947. La vie d’Alter et de Régine.
Virgule, avec extrait 3 (sur les quatre photographies prises par le Sonderkommando)
Les cahiers, « un témoignage essentiel sur l’histoire de la ‘Solution finale’ et, plus spécifiquement, sur les actions de résistance entreprises par les juifs jusque dans les centres de mise à mort ». Explications. Ces cahiers appartiennent à un corpus très restreint, ceux des détenus du Sonderkommando. L’assassinat des déportés juifs dans la chambre à gaz-crématoire n° 5, dans les cahiers et dans le témoignage recueilli en 1985 au musée d’Auschwitz (voir p. 300 et s.). La question des photographies clandestines du Sonderkommando. Les 4 photographies que les hommes du Sonderkommando sont parvenus à réaliser (voir p. 308). L’examen des divers témoignages d’Alter permet d’identifier l’auteur des photographies clandestines du Sonderkommando, est-il dit à la p. 316 : Alex, alias Alberto Errera (né en 1913, arrivé à Auschwitz le 11 avril 1944, a tenté de s’enfuir le 9 août 1944).
Un livre pour les jeunes générations.
Générique de fin, avec extrait 4 (sur la transmission de la mémoire d’Alter Fajnzylberg)
