Cent soixante-et-onzième numéro de Chemins d’histoire, douzième de la cinquième saison
Émission diffusée le dimanche 3 décembre 2023
Les invités : Dominique Iogna-Prat, directeur d’études émérite au CNRS, directeur d’études émérite à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, et Alain Rauwel, professeur agrégé d’histoire à l’université de Bourgogne, codirecteurs, avec Frédéric Gabriel, du Dictionnaire critique de l’Eglise, PUF, 2023.
Le thème : Un dictionnaire pour l'(histoire de l’) Eglise
Le canevas de l’émission
Le projet. Les origines et l’objet. Explicitation du titre. Un dictionnaire, critique, de l’Eglise. Commençons par l’objet : l’Eglise. De quoi parle-t-on ? On est bien dans une perspective de sciences sociales critiques. Terme dérobé par Emile Durkheim aux confessions qui le revendiquent historiquement pour en faire une notion propre à désigner toute communauté soudée par un ensemble de valeurs et de pratiques définissable comme religion. Eglise et ecclésialité. Le problème n’est pas « qu’est-ce que l’Eglise ? » mais « comment fait-on Eglise dans telle configuration sociale ? » C’est ce comment qui définit l’ecclésiaslité. Pas d’ontologie de l’Eglise mais une analyse des dynamiques de l’ecclésiaslité. Oui, mais… La reductio ad Vaticanum est tentante ! Certes, l’entrée Eglises du dictionnaire comporte un « s », soulignant l’articulation entre l’idéal unitaire et la pluralité des formes ecclésiales (article avec une forme dimension comparative, signé Luc Forestier, Aurélien Girard et Laurent Tatarenko). Et pourtant… Beaucoup d’articles sont très centrées sur la théologie et les dynamiques proprement catholiques. Voir le monumental article « Papauté » (vu bien sûr au miroir des critiques). Et les Eglises protestantes ? Et le monde oriental ? Comment les appréhender dans ce cadre ? Il n’y a pas d’article « Protestantisme » (mais bien une entrée « Réforme »). Certes, réflexions très fortes sur le protestantisme dans certains articles (Discipline, disciplinement, article signé Arnaud Fossier, Jean-Pascal Gay et Christian Grosse). Le terme d’Eglise n’est-il pas porteur d’une vision rétrograde ? De l’histoire de l’Eglise (de Fliche et Martin) à l’histoire du christianisme (celle qui paraît aux éditions Desclée, dans les années 1990). Pas d’article « Christianisme » mais une entrée « Chrétienté ». Réponse des auteurs : le terme, très vague, de christianisme soulève autant de problèmes que celui d’Eglise, qui est une « notion véritable, qui permet la confrontation des perspectives théoriques et le dépassement de ce sfumato des objets d’étude dont ne s’accommode que trop bien le néo-positivisme ambiant » (p. XIII). La dimension critique de l’ouvrage, assumée, revendiquée, explicitée, suffit-elle à renverser la dynamique historiographique tout en s’inscrivant dans une épaisseur historiographique souvent très dense ? Voir le violet de l’ouvrage. Un projet d’ecclésiologie ? Les auteurs sont-ils des ecclésiologues ? Explications.
Les auteurs et la forme-dictionnaire. 83 entrées. 82 auteurs répertoriés au début de l’ouvrage (61 hommes, 21 femmes). L’écriture du « réseau de notices ». Le fonctionnement et ce qu’il dit du projet. Le choix des entrées, nécessairement discutable. Quid des persécutions ? Quid des abus sexuels ? Etc. Les auteurs, qui sont-ils ? Quelles compétences ? Quels espaces de référence ?
Quelques entrées du dictionnaire. Très fine réflexion sur le territoire, la territorialité, la territorialisation (voir cet article, signé Danièle Hervieu-Léger, Dominique Iogna-Prat, Michel Lauwers et Dominic Moreau). La matérialité (qui est bien une affaire d’Eglise).
Le Dictionnaire et son public.
Quelques prolongements
On peut lire un compte rendu de l’ouvrage par Richard Figuier, pour le site en-attendant-nadeau.fr. Voir aussi un entretien donné au Monde par Alain Rauwel.



La cathédrale de Coutances (Manche) aujourd’hui, le temple de Paradis à Lyon dans les années 1560, d’après un tableau signé Jean Perrissin (Genève, 1569-1570), la cathédrale russe de Paris (vue contemporaine)