Emission 119 : Une histoire de la Gaule du Nord avant et après la conquête, avec Michel Reddé

Cent-dix-neuvième numéro de Chemins d’histoire, trente-huitième numéro de la troisième saison

Émission diffusée le vendredi 15 juillet 2022

L’invité : Michel Reddé, directeur d’études émérite à l’Ecole pratique des hautes études, auteur de Gallia Comata. La Gaule du Nord, de l’indépendance à l’Empire romain, Presses unviersitaires de Rennes, 2022 [livre également accessible dans sa totalité].

Le thème : Une histoire de la Gaule du Nord avant et après la conquête

Le canevas de l’émission

Le prologue veut séparer l’histoire de la légende : « Que la Gaule n’est pas la France ». Magnifique texte d’ouverture (3 décembre 1919) signé Camille Jullian, professeur au Collège de France, à l’occasion d’un cours d’histoire générale intitulé « Comment meurent les patries ». La Gaule, qui « fait présager la France » et qui la « porte en elle », une Gaule, « qui est morte dans son indépendance politique et dans sa personnalité morale », dont « il n’est resté que les vertus de son sol et le sang de ses hommes ». Et d’ajouter plus loin : « Pour que le sol de France devînt une seconde fois le domaine d’une nation, il fallut attendre de nombreux siècles d’actions mystérieuses, pendant lesquels la vertu de la terre et le sang des hommes façonnèrent lentement la figure d’une patrie nouvelle ». Dans le prologue, rappel historiographique. La IIIe République et la résurrection des Gaulois et de Vercingétorix et leur promotion au rang de mythe national. Avec l’idée que la leçon de Rome était nécessaire, après la défaite, pour que la Gaule accède à la civilisation. La celtomanie et l’université. Retour à Camille Jullian et à l’évolution de sa pensée, à partir de son Vercingétorix, 1901 (voir une édition de 1921). De cette époque est née une tension entre classicisants (récit qui commence avec la conquête, épisode provincial de la grande histoire romaine) et protohistoriens (récit qui fait de la conquête une fin voire une décadence). Voir l’opposition entre Theodor Mommsen et Camille Jullian. En est-on sorti ? Voir les querelles sur la localisation d’Alésia (Michel Reddé a dirigé de nombreux chantiers archéologiques, notamment celui d’Alésia).

Associer la vision des protohistoriens et celle des spécialistes du monde romain. L’appui de l’archéologie.

Quel espace concerné ? La Gallia Comata, la Gaule chevelue conquise par César (appellation de l’empereur Claude dans un discours célèbre prononcé devant le Sénat un siècle après Alésia), par opposition à celle du Midi, officiellement annexée depuis 121 avant notre ère. Monde étudié englobe les futures provinces romaines d’Aquitaine, de Lyonnaise, de Belgique ainsi que les deux Germanies (voir carte, p. 18, France, Belgique, Luxembourg, Allemagne, Suisse). La province du Midi, celle que les Romains appellent la Narbonnaise, relève d’une histoire différente. Surtout le nord de la Gallia Comata, plus familière à l’auteur. Quelle période ? De La Tène finale (explication sur la culture de La Tène ou second âge du fer, apogée de la culture celtique) à la dernière grande révolte de l’ancienne Comata, vers 68-70. Avec quelques points de repère (début de la guerre des Gaules, en 58, Alésia en 52 av. notre ère, la bataille du Teutobourg en 9 ou la révolte de Florus et Sacrovir en 21).

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Quelques éléments saillants du livre (1). Le pays et les hommes. Climat et végétation. On a longtemps cru que la Gaule était couverte de vastes forêts à l’arrivée de César. Qu’en était-il vraiment ? Comment le sait-on ? 9 millions d’habitants vers 165 après notre ère, vers 6,4 millions à l’époque de la guerre des Gaules ? Une mosaïque de peuples. Un monde de paysans. Intensification dans l’exploitation du sol à partir de La Tène moyenne. Quel habitat ? Voir la photographie p. 71. De la ferme indigène à la ferme gallo-romaine : éléments de continuité. Des ruptures aussi ? Voir l’exemple du développement de la viticulture en Gaule du Nord. La villa romaine, un nouveau système productif ? Le phénomène urbain. Il y a bien des villes avant la conquête en Gaule du Nord. Quel type de villes ? Quel habitat ? Les villes romaines. Analyse de la carte de la p. 161 : les capitales de cité dans les Trois Gaules et les Germanies. Religion et pratiques religieuses. Voir la p. 243 : « Poser la question de la religion gauloise en termes de rupture radicale ou de continuité sous-jacente, c’est probablement se fourvoyer et oublier que c’était le cadre civique dans lequel s’exerçaient les cultes communautaires qui avait changé, suivant des étapes que nous ne pouvons pas reconstituer ». Explications. Exemple : le pilier des nautes, découvert en 1711 sous le chœur de Notre-Dame de Paris, dédié à Jupiter Optimus Maximus, en l’honneur de Tibère César Auguste, par les nautes de Paris, associant sur ses différentes faces divinités romaines et gauloises, probablement surmonté par une statue de Jupiter.

Quelques éléments saillants du livre (2). Les étapes de l’intégration. Formes de l’influence romaine avant la conquête. La Gaule conquise. Quel état économique après la conquête ? Quelle organisation politique ? La division en trois provinces, décision d’Auguste. Les hypothèses de Christian Goudineau. Une Germanie augustéenne ? La création des deux Germanies date de Domitien. Quelle administration locale ? Réflexions sur la romanisation et ses soubresauts. Les révoltes de 21 et de 68-70. Epilogue : le rythme incertain du changement (administration, urbanisation, transformation lente des campagnes, phénomènes religieux, les pratiques druidiques sont interdites sous Auguste pour les citoyens romains, extension sous Tibère et sous Claude, la question de la langue, une enquête complexe, persistance de la langue gauloise).

Carte montrant la localisation des capitales de cité dans les Trois Gaules et les Germanies à l’époque julio-claudienne
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